Truite infectée par l'ISAV

De nouvelles connaissances et outils pour lutter contre l'anémie infectieuse du saumon

De nouvelles connaissances et outils pour lutter contre l'anémie infectieuse du saumon

L'anémie infectieuse du saumon (ISA) est une pathologie hautement contagieuse qui a déjà mis à mal l'industrie du saumon d'élevage dans de nombreux pays. Les chercheurs de l'unité Virologie et Immunologie Moléculaire (VIM) se sont attachés à compléter le séquençage du génome du virus responsable de cette maladie et à produire des outils de diagnostic (anticorps monoclonaux). Leurs travaux permettent d'envisager le développement de nouvelles stratégies vaccinales.

Localisé initialement dans l’Atlantique Nord (Norvège, Ecosse, Canada), le virus de l’anémie infectieuse se rencontre désormais dans tous les grands pays producteurs de saumon d’élevage. La dernière grande épidémie en date, touchant l’ensemble du Chili en 2007, illustre de façon éloquente les pertes considérables que le virus est susceptible d’occasionner. La production avait alors chuté de façon vertigineuse, passant de 400 000 à 250 000 tonnes en 2009. Propagé par des porteurs sains, ce virus est aussi une menace pour la truite d’élevage. Par infection expérimentale (injection du virus ou immersion dans un bain contaminé), certaines variétés de truite présentent jusqu’à 30 % de mortalité.

Alevin de saumon de 2 mois environ

L’agent pathogène (ISAV pour Infectious Salmon Anemia Virus) responsable de l’anémie infectieuse appartient à la famille des orthomyxoviridae. Cette famille de virus (la même que celle des virus de la grippe) présente la particularité d’avoir son patrimoine génétique porté par huit molécules d’ARN en lieu et place d’une molécule d’ADN. Chez les organismes vivants, les molécules d’ARN servent de copie de l’ADN pour la synthèse de protéines. Cette inversion de situation constatée chez de nombreux virus a conduit à développer dans les années 1980, une technologie dite de « génétique inverse » qui consiste à synthétiser et cloner une copie ADN du génome viral. On parle d’ADN complémentaire ou ADNc. Cela permet ensuite de manipuler le génome de ces virus avec les outils de biologie moléculaire conventionnels. Il est alors possible d’identifier les différentes protéines codées par le génome viral et de déterminer celles impliquées dans la virulence. Des modifications précises du génome du virus permettraient d’en atténuer le pouvoir pathogène sans en diminuer le pouvoir antigénique. Gage de sécurité, ces modifications ciblées évitent tout retour accidentel à la virulence. On parle alors de virus atténués, virus dont l’efficacité vaccinale est optimale.

C’est avec l’objectif d’obtenir des souches de virus vivants atténués que les chercheurs de l’INRA ont porté leur effort sur l’obtention des séquences des extrémités des molécules d’ARN virales. Ces régions sont primordiales pour le bon fonctionnement du génome du virus, elles intègrent les signaux de transcription des gènes et de réplication du génome. Le génome du virus étant réparti sur huit molécules d’ARN autonomes, il faut donc obtenir les extrémités de chacun des fragments. Pour cela, une souche ISAV a été cultivée sur des cellules de saumon in-vitro puis l’ARN viral a été extrait. Par transcription inverse, des fragments d’ADNc de chaque ARN viral ont été amplifiés. Les chercheurs ont entièrement séquencés les copies obtenues. Ils ont caractérisé les extrémités des huit fragments par RACE (rapid amplification of cDNA ends). L’obtention de la séquence complète du génome de l’ISAV est un prérequis pour mieux comprendre le fonctionnement de ce virus et de ses interactions avec son hôte, le saumon. De nouvelles perspectives pour la création de virus atténués vivants, agents de vaccinations très efficaces sont maintenant envisageables.

En parallèle au séquençage du génome de l’ISAV, les scientifiques ont aussi développé et caractérisé quatre anticorps monoclonaux dirigés contre trois protéines du virus (l’hemagglutinine estérase, HE ; la nucléoprotéine, N ; la protéine de la matrice M associée ou non à de l’actine). Ces anticorps représentent des outils indispensables pour le diagnostic de cette maladie virale et a permis le développement de différents tests: test d’immunofluorescence indirecte, test de séroneutralisation, Western blot, Immunoprécipitation.

Date de création : 25 juillet 2011 | Rédaction : Inra Services Presse